Rencontrez Me Esther Sterling, une avocate en protection de la jeunesse, au CIUSSS de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal. Persévérante à souhait, elle a occupé de multiples fonctions au cours de sa carrière, avant de réaliser son rêve professionnel ultime. Une femme pour qui le bien-être des enfants est constamment au cœur de ses actions.
Me Sterling, parlez-nous un peu de votre cheminement professionnel?
« À l’adolescence, je suis déménagée en Floride avec ma famille, où j’y ai terminé mes études secondaires. En 2003, j’ai complété un baccalauréat en criminologie à la Florida State University. Peu après mon retour au Québec, j’ai œuvré à titre d’intervenante sociale dans un foyer de groupe pour les Centres jeunesse de Montréal. J’y ai successivement occupé des postes d’éducatrice en centre de réadaptation et d’agente de relations humaines.
De 2010 à 2011, j’ai effectué une maîtrise en administration publique, profil « gestion en santé », tout en continuant à travailler et en ayant mon premier bébé. Puis, en 2014, j’ai décroché un poste de conseillère cadre, affectée à la supervision des employés sur la liste de rappel, au sein de la Direction de la protection de la jeunesse.
Après la réforme Barrette, j’ai été mutée à un poste de cheffe de service en réadaptation, au Mont Saint-Antoine, une installation du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal. Simultanément, je me suis inscrite à des études en droit, à l’UQAM, en vue de réaliser mon rêve : devenir avocate. »
Et votre arrivée au sein de notre CIUSSS?
« Après avoir terminé mon barreau, en juin 2019, j’ai effectué un stage en droit de la jeunesse au sein de notre CIUSSS. Peu après la conclusion de celui-ci, on m’a offert un remplacement, la pandémie ayant entraîné le départ de plusieurs membres au sein de l’équipe du contentieux. J’ai donc joint officiellement la grande famille du CIUSSS de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal en avril 2020. »
Quelles sont vos principales fonctions?
« Je suis souvent appelée à faire des représentations au tribunal de la jeunesse liées à des situations familiales. Dans mon rôle d’avocate, je dois faire la preuve qu’une situation compromet la sécurité ou le développement d’un enfant. J’étudie, entre autres, les renseignements colligés dans un rapport psychosocial préparé par les intervenants psychosociaux (agents de relations humaines et travailleurs sociaux). Une fois la preuve exposée, je présente un plan de mesures correctives à adopter.
Toutefois, avant de présenter un argumentaire devant le juge, un travail de conciliation s’effectue avec les avocats des autres parties afin d’élaborer des projets d’entente. Le Code de procédure civile et la Loi sur la protection de la jeunesse stipulent de privilégier des ententes entre les parties, dans les meilleurs intérêts de l’enfant. Lorsqu’une entente est soumise à un juge, celle-ci devient alors le jugement. Ce jugement est transmis à l’agent de relations humaines ou au travailleur social qui s’assure de l’application des mesures. Mon mandat se termine après le passage devant le tribunal et une fois le jugement rendu. Je demeure cependant disponible auprès de l’agent de relations humaines ou du travailleur social pour une consultation juridique, au besoin.
Une autre de mes fonctions consiste à assurer un service de garde téléphonique. En situation d’urgence, un intervenant psychosocial peut me contacter pour me signaler l’abandon d’un enfant, par exemple. À l’aide de l’information recueillie verbalement, je rédige une procédure qui sera déposée en cour, en vue de l’obtention d’un jugement provisoire. »
Quels sont les principaux défis rencontrés?
« Chaque cas soumis constitue un cas d’espèce. Je dois constamment m’adapter à de nouvelles situations. Il est donc primordial de me tenir à jour, de suivre des formations, de connaître les amendements apportés à la Loi sur la protection de la jeunesse et d’être à l’affût de la nouvelle jurisprudence.
Un autre défi réside dans la prise de contact avec les parents. Certains présentent des problèmes de santé mentale, alors que d’autres sont mécontents, voire verbalement agressifs. La charge émotionnelle peut être lourde, autant pour nous, les avocats, que pour les intervenants psychosociaux.
Enfin, la Direction de la protection de la jeunesse a rarement une bonne presse, ce qui peut s’avérer démotivant. »
Qu’est-ce qui vous allume dans vos fonctions?
« La relation d’aide, un aspect fondamental de mon travail depuis toujours. J’accorde une grande importance à l’être humain, qu’il s’agisse d’un enfant, bien sûr, mais aussi d’un parent. Identifier la meilleure option, arriver à un projet d’entente, c’est très gratifiant. Dans mon rôle d’avocate, j’ai l’humble sentiment de faire une différence.
Aussi, j’apprécie les échanges avec les intervenants psychosociaux et les réviseurs, tout comme la collégialité qui règne avec mes collègues. »
Quelles sont les principales qualités nécessaires pour bien accomplir votre travail?
« En premier lieu, le respect. C’est la base de mes interventions. S’ajoutent à cela, notamment, la polyvalence, la maîtrise des émotions, l’ouverture et l’adaptation aux changements. »
Me Sterling a gentiment accepté de nous dévoiler quelques facettes de sa vie privée…
Parlez-nous un peu de vous…
« Je suis d’origine haïtienne, mais née au Québec. Mon mari et moi sommes les heureux parents de deux garçons âgés de 5 et 13 ans. J’adore les rassemblements avec les membres de ma famille qui demeurent à proximité. Nous formons un clan tissé serré! ».
Pour vous détendre, quelles sont vos options préférées?
« L’entraînement physique! Dès 5 h du matin, je pars faire mon jogging. C’est un véritable exutoire. Je m’adonne aussi à la musculation en gymnase. »
Qu’est-ce qui vous rend heureuse?
« Sur le plan personnel, voir la vie à travers les yeux de mon jeune garçon de 5 ans. C’est un émerveillement quotidien. Je chéris aussi nos voyages en Floride pour visiter ma maman. Du côté professionnel, mon travail. Je me considère vraiment au bon endroit dans ma carrière. »
« Selon la Loi sur la protection de la jeunesse, il y a six situations pour lesquelles il peut y avoir un signalement, alors que la sécurité ou le développement d’un enfant est considéré comme compromis : abandon, négligence, mauvais traitements psychologiques, abus sexuels, abus physiques et troubles de comportement sérieux », relate notre sujet-vedette du mois.
« Une journée à la cour marquée par la contestation peut entraîner des répercussions négatives, allant jusqu’à anéantir le travail de conciliation. Voilà pourquoi une entente négociée entre les parties est toujours à privilégier », explique Me Sterling.