Soutenir les personnes les plus vulnérables de la société québécoise

    Une approche exceptionnelle à l’intention des personnes présentant une déficience intellectuelle et des troubles de comportement

    Par Donald Bidd et Glenda Castro

    Nous habitons à Dorval et sommes les parents d’un fils de 33 ans, Justin, qui a une déficience intellectuelle importante, et qui est sujet à des comportements graves et problématiques. C’est un jeune homme doué, mais s’occuper de lui, au fil des ans, nous a pris toute notre énergie, notamment pour répondre à ses besoins complexes tout en veillant à notre propre santé et à l’équilibre de notre vie familiale.

    À la fin de son adolescence, Justin est entré dans une période très difficile marquée par des comportements préoccupants, notamment d’agression et d’automutilation. Nous n’étions absolument pas préparés à faire face à cette situation extrême. C’était un véritable combat à mener jour après jour. Notre quotidien a été bouleversé et nous avons souvent craint ses crises imprévisibles.

    Nous avions désespérément besoin d’aide. Le programme de déficience intellectuelle, trouble du spectre de l’autisme et déficience physique (DI-TSA-DP) du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal nous a proposé les services d’une équipe dynamique, composée d’un psychiatre, d’un psychologue, d’un éducateur, d’un travailleur social et d’une infirmière. L’équipe a utilisé une approche systématique pour analyser les comportements préoccupants de Justin, et nous apprendre des stratégies pratiques pour y faire face. Le soutien que nous avons reçu a permis de stabiliser Justin. Mais la nature chronique de son profil, son besoin d’un soutien continu de haut niveau et nos limites ont rendu nécessaire son placement dans une résidence spécialisée.

    Le CIUSSS nous a alors proposé de confier Justin à une telle résidence (appelée ressource intermédiaire ou RI), à Sainte-Lucie-des-Laurentides. La résidence est administrée par Amanda Abergel (psychoéducatrice agréée) et Alain Lessard (infirmier auxiliaire agréé), qui ont chacun plus de 25 années d’expérience. Leur approche très efficace se fonde sur l’acceptation inconditionnelle de chaque client. Mme Abergel : « Chacun de nos clients est une personne humaine à part entière, avec ses points forts et ses points faibles, comme nous tous. Je pense qu’il est absolument nécessaire de considérer nos résidents comme nos égaux et de les aider à développer leur potentiel. »

    Mme Abergel et M. Lessard ont développé des pratiques et procédé à des interventions exemplaires qui permettent de réduire considérablement les comportements préoccupants et d’assurer une qualité de vie élevée à leurs clients. Ils s’appuient sur la conviction que chaque personne peut devenir responsable de ses actes en renforçant sa capacité de prise de conscience et en développant ses compétences. Des ateliers de « sensibilité émotionnelle » permettent aux résidents de prendre conscience de leurs impulsions négatives et de faire de meilleurs choix que d’adopter des comportements difficiles. Un programme d’activités enrichissantes et amusantes est au cœur de la stratégie : aide à certaines tâches, nourrissage des chevaux, sorties au cinéma et au restaurant, entraînements au taekwondo, ateliers de théâtre, promenades dans la campagne.

    Les administrateurs de cette résidence privilégient des relations ouvertes et une communication claire avec les parents, dont les connaissances sont pleinement intégrées à leurs interventions. Autre facteur de réussite essentiel, le maintien en poste d’un personnel hautement engagé et compétent, qui aime son travail et peut établir des liens avec les clients. Amanda Abergel : « Nos clients apprécient le fait que notre personnel soit très décontracté et les accepte pour ce qu’ils sont, qu’ils sont capables de voir la vraie personne derrière le comportement difficile. Le personnel voit son travail comme une occasion d’améliorer significativement la vie de nos clients. »

    Mais la gestion d’une résidence aussi spécialisée présente des difficultés, comme le fait remarquer Mme Abergel : « Répondre aux besoins de ces clients spéciaux demande beaucoup d’attention et d’énergie. Il faut disposer, en tout temps, d’un niveau élevé de ressources pour maintenir les mesures de soutien pour nos clients et éviter qu’ils ne régressent. Notre personnel et nous-mêmes devons également être vigilants quant à notre propre santé afin d’être pleinement disponibles pour eux. »

    Le programme DI-TSA-DP est responsable de la conformité aux normes de soins des ressources intermédiaires et fournit aux administrateurs plusieurs services de soutien professionnel essentiels. Martin Carrière, gestionnaire des services résidentiels « Soutenir les personnes ayant des comportements préoccupants est une entreprise complexe. Nos spécialistes apportent une variété de compétences qui leur permettent de travailler avec les administrateurs à l’établissement d’objectifs de développement précis pour chaque client. L’approche utilisée dans cette ressource intermédiaire est exemplaire ».

    Grâce aux soins et au dévouement de Mme Abergel et de M. Lessard et au soutien professionnel du CIUSSS, Justin s’est épanoui. Il peut exprimer ses sentiments et, la plupart du temps, éviter de recourir à des comportements préoccupants lorsqu’il est anxieux. Il s’exprime de mieux en mieux. Nous jouissons à présent d’une profonde tranquillité d’esprit, sachant qu’il est sur une si bonne voie. Mais sa vulnérabilité permanente aux comportements préoccupants fait que lui et les autres personnes ayant le même profil auront toujours besoin de ce type d’environnement spécialisé et des ressources importantes requises pour assurer leur développement dans la bonne direction.

    Une société véritablement humaine est une société qui prend soin de ses membres les plus vulnérables. Là-bas, dans les montagnes des Laurentides, un couple très dévoué nous montre comment faire.

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